
Selon le dernier communiqué émanant du conseil des ministres, il a été constaté qu’en 2025, le Gabon a enregistré un taux de 93,25 % de marchés publics attribués de manière illégale sans appel d’offres. D’après le ministère gabonais en charge de la gestion des marchés publics, ce chiffre dépasse largement le seuil réglementaire fixé à 15 % pour ce type de procédure.
Le recours aux marchés publics de gré à gré est une pratique de longue date au Gabon.Cette méthode est souvent privilégiée par les responsables publics car elle facilite des arrangements directs avec les fournisseurs, ce qui implique fréquemment des pratiques de corruption telles que les pots-de-vin.
En effet, pour qu’une entreprise soit retenue, il est souvent nécessaire qu’elle fasse des concessions financières.
Malgré les appels récurrents en faveur d’une amélioration de la planification budgétaire et de la transparence dans la gestion des finances publiques, une tendance persistante inquiète les observateurs au Gabon.
Celle-ci se manifeste par un empressement soudain de plusieurs ministères et directions générales à soumettre leurs dossiers de passation de marchés publics en décembre, majoritairement via la procédure de gré à gré.Cette habitude, récurrente ces dernières années, soulève de nombreuses questions.
Pourquoi tant d’entités attendent-elles la fin de l’année pour initier des processus qui pourraient être commencés plus tôt dans l’année ? Et pourquoi opter pour le gré à gré, une méthode souvent critiquée pour son manque de transparence ?Une gestion budgétaire sous pression :D’après des sources proches du ministère du Budget, ce phénomène s’explique en partie par une anticipation déficiente dans l’exécution des plans d’investissement public.
« Nombreuses sont les administrations qui ne présentent pas leurs plans de passation au début de l’année.
En conséquence, elles se retrouvent à vouloir tout boucler en décembre, dans l’urgence », confie un haut fonctionnaire souhaitant garder l’anonymat.
Cette précipitation entraîne alors un recours accru au gré à gré, justifié par le manque de temps pour organiser des appels d’offres ouverts.
Ce mécanisme favorise les abus, notamment le favoritisme, la surfacturation ou l’absence de contrôle qualité.
Des demandes de réformes :Les acteurs de la société civile, particulièrement ceux engagés dans la lutte contre la corruption, tirent la sonnette d’alarme.
Ils estiment que cette situation met en lumière des lacunes structurelles dans la gouvernance publique.
« Il est impératif de réviser les calendriers budgétaires, de renforcer les capacités en planification et d’exiger une justification systématique du recours au gré à gré », plaide un responsable d’ONG.
La Direction Générale des Marchés Publics (DGMP) se trouve chaque année débordée par une avalanche de dossiers présentés in extremis. Une situation qui nuit à la rigueur administrative et à la qualité de l’évaluation des projets.
Dans le cadre des réformes entreprises, des voix s’élèvent pour que l’approbation des marchés en fin d’année soit conditionnée par une justification rigoureuse et documentée.
Une telle mesure pourrait assainir le processus de passation et inciter les ministères à mieux planifier leurs besoins tout au long de l’année.Il reste à voir si cette volonté de réforme se traduirait par des actions concrètes.
En attendant, le mois de décembre demeure, pour de nombreux acteurs publics, le théâtre d’une course contre la montre, non sans répercussions sur la qualité de la dépense publique.
La Rédaction